Une longue histoire
Je dois beaucoup au célèbre MMO (Massively Multiplayer Online) de Blizzard Entertainement, sorti en 2004 et qui continue d’exister – sous diverses formes – encore aujourd’hui. Dans le précédent blog où j’écrivais, la moitié des articles que j’ai produit concernaient World of Warcraft. Inspiré par ce dernier j’ai écrit sur le travail en équipe, l’écologie et même la spiritualité. Bref, ce jeu et son univers m’accompagnent depuis mon adolescence et encore aujourd’hui, j’ai plaisir à arpenter les vastes étendues d’Azeroth. Et c’est ce que j’ai envie de partager aujourd’hui. Pour ces billets sur des jeux qui m’ont marqué, je vais toujours raisonner en trois temps : comment j’ai commencé, pourquoi j’ai continué d’y jouer et en quoi ce jeu me fait rêver.
Comment j’ai commencé World of Warcraft …
Comme beaucoup de gens, j’ai commencé World of Warcraft (WoW ci-après) parce qu’une personne parmi mes proches y jouait et que, en le regardant, l’envie d’y vivre ma propre expérience est née. Dans mon cas, il s’agit de l’un de mes frères (qui se reconnaîtra coupable, j’en suis sûr). D’ailleurs, avec le recul, je me rends que ce dernier est directement responsable du fait que j’ai passé l’équivalent de centaines d’heures sur WoW, ce qui n’est pas anodin.
Cela dit, cette dimension de la transmission du virus WoW fait partie de l’expérience singulière de ce jeu. C’est l’une des occurrences de transmissions de passion les plus directes et définies que j’ai pu vivre : un proche m’a fait découvrir cet univers, je l’ai fait découvrir à des amis d’école (à l’époque), qui l’ont ensuite montré à leurs proches, etc. J’ai vraiment le souvenir qu’être sur WoW créait un sentiment d’appartenance à une petite communauté ce qui, pour le moi de 12-15 ans, revêtait une certaine importance. D’ailleurs, dans les relations que j’ai aujourd’hui qui ont joué/joue encore à WoW, c’est un élément en commun qui compte comme un fort souvenir partagé. Et dès que je rencontre quelqu’un qui, lui aussi « a joué à WoW », cela suscite chez moi une certaine sympathie, je dois bien le reconnaître.
Pourquoi j’ai continué à jouer
Pour moi, WoW c’est l’histoire de mon avatar in-Game : Kalecos (vous en trouverez une belle illustration ici) et dont la figurine trône encore fièrement en face de mon bureau. Le pseudo a une importance centrale dans les jeux en ligne comme WoW, car celui du personnage qu’on joue principalement (dans le jargon, notre main) devient rapidement le nom par lequel nos compagnons de jeu nous appellent. Ainsi, le nom de notre Avatar nous permet également de revêtir un rôle ou une identité altérée mais surtout rêvée.
Ce phénomène assez spontané d’identification est la raison pour laquelle j’ai continué à jouer à WoW : j’aimais imaginer ce que vivait Kalecos et à travers cette fiction, je pouvais y vivre milles choses qui donnaient des couleurs à mon quotidien. Personnellement, je ne jouais pas tellement pour atteindre un haut niveau de maîtrise du jeu (je n’ai d’ailleurs jamais été très bon) mais simplement parce qu’à travers le personnage, je pouvais naviguer dans un monde fantastique où les autres protagonistes réelles (les joueur.ses) m’appelaient « Kalecos ».
Warcraft : un univers en constante création
Et quel monde fantastique. C’est l’un des points sur lequel le studio Blizzard était excellent : ils et elles savent donner vie à un univers riche et immersif. Le monde de « Warcraft » existe depuis près de 30 ans. Livres, BD, cinématiques et même un film ont accompagné la construction progressive du monde d’Azeroth. Blizzard a donné une substance forte et dense à son univers, en ayant compris que l’attachement des joueurs.ses passent notamment par la crédibilité et l’authenticité de l’univers qu’ils et elles arpentent.
De plus la dynamique entre l’histoire du jeu (le lore) et le personnage incarné est particulière dans un MMO. De fait, les avatars que nous créons en jeu n’existent pas individuellement dans l’histoire. Il n’y a pas de Kalecos dans l’histoire de WoW. Dans les livres ou cinématiques, les personnages incarnés par les joueurs et joueuses sont appelés aventuriers, héros, etc. Cette anonymisation pourrait donner comme effet « qu’on n’existe pas » mais pour moi c’est tout l’inverse : cela permet à mon imagination de créer librement l’existence de mon personnage dans l’histoire d’Azeroth.
Par exemple, quand le livre Crimes de Guerre¸ sortit en 2014, narrait le procès du boss final de l’extension Mist of Pandaria, j’imaginais que Kalecos était présent audit procès, interagissait avec les protagonistes du récit, etc. L’absence de narration fixée dans un MMO permet de rendre unique l’histoire de chaque avatar. Le jeu nous offre un univers où notre imagination joue librement.
Comment ce jeu me fait rêver
Comme l’explique le philosophie Bruno Latour, les personnages de fiction, dès lors que nous les tenons (en lisant un livre, en explorant un jeu) ont une puissance d’existence propre. Du moment que je joue Kalecos, que je donne sens et histoire à ses aventures, il existe. C’est la raison pour laquelle les premières fictions que j’ai écrites sont des fragments de narration vécue in-game (j’en reparlerais dans un projet billet).
Et c’est sans doute cela que je retiens le plus de mon parcours dans World of Warcraft. Ses décors, ses personnages, son vaste univers, ses musiques incroyables furent à une période de ma vie un véritable mode d’existence. Il y avait bien sûr des désagréments à cela mais lors d’une phase de l’existence où trouver des repères semblait délicats, WoW offrait un véritable sanctuaire vivifiant mon imagination. Et ce sentiment de refuge persiste encore lorsque, de temps à autre, je me relance dans une nouvelle aventure sur Azeroth.
On ne sait plus trop pourquoi on continue de jouer à WoW (qui plus est dans sa version retro de 2004) mais on y retourne. Comme beaucoup, j’ai grandi avec ce jeu et son univers. C’est sans doute pour cela qu’une sensation de « chez moi » m’envahit toujours autant quand j’entends les premiers accords de Legends of Azeroth…